Friday, February 23, 1990

23 Février 1962

Je n'ai pas dormi, cette nuit.
Le blizzard mauvais gelait ceux d'entre nous trop épuisés pour piétiner toute la nuit. J'en ai profité pour arrêter la cigarette. Un tir de sniper a fait sauter le crâne de Dras alors que je lui allumais une papirossa. Je lui ai piqué son paquet. Des hommes des brigades spéciales ont ramassé les cadavres dans la tranchée boueuse. Je ne sais pas ce qu'ils en font, mais des bruits courent.

Y paraît que le front avance. Les gradés s'en réjouissent. Nous on s'en fout, on meurt. Même mon encre commence à geler. Merde! C'est ça qui me permet de tenir. En plus, ça m'apporte des vivres. Des bidasses veulent écrire à leur femme, restée à l'arrière, et depuis longtemps remariées à un de ces richards qui vendent leur place au front. Alors j'écris. Des mots vides de sens: amour, espoir. Toujours croire, espérer. Enfin, je crois que je suis pas mieux qu'eux. La poussée d'adrénaline de l'assaut du 19 peut être? Demain, oui, demain j'écrirai ce qui s'est passé cette nuit là. Pour le sortir de ma tête, hurlant et griffant, et le tuer sur la page, l'écraser sur la feuille. Expliquer à celui qui me lira ce qui me fait hurler dans mes rares moments d'abandon.

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